La comédie d’horreur est un genre particulièrement difficile à faire et surtout à bien faire. Il faut savoir doser les blagues et le sang et atteindre un précieux équilibre qui laisse assez de place à chaque élément sans éclipser ou annuler le reste. Life After Beth et Suburban Gothic, deux films présenté un à la suite de l’autre au Festival Fantasia hier soir, se donnaient tous deux la mission de relever ce défi.
Zach est inconsolable. Sa copine Beth est décédée quelques jours auparavant et il n’arrive plus à trouver de raison de continuer. Malgré son aveu que leur couple éprouvait des difficultés et qu’ils s’étaient temporairement séparé lorsque le drame a frappé, Zach se morfond en se rappelant toutes les choses qu’il n’a jamais pu dire à la fille qu’il aimait, tous les gestes qu’il a repoussé à plus tard. Il trouve un refuge émotionnel chez les parents de Beth, les Slocum (joués par John C. Reilly et Molly Shannon), jusqu’à ce que ceux-ci cessent de retourner ses appels et refusent de le laisser entrer chez eux. C’est en fouinant autour de la maison que Zach découvre l’impossible: Beth est revenue, sans souvenir des événements ayant mené à sa mort. Zach est fou de joie et se fait un devoir d’enfin profiter pleinement de la présence de sa bien-aimée. Beth par contre est… différente. Elle a des excès de colère terrifiants, elle développe un amour étrangement intense pour la musique de salle d’attente (le smooth jazz) et a un énorme appétit… sexuel. Zach apprend donc à composer avec ses changements parce qu’il aime Beth et l’aimera toujours, quoiqu’il arrive. Du moins c’est ce dont il tente de se convaincre.
Life After Beth est peut-être rempli de créatures étranges mais son histoire en est une très ordinaire; l’histoire d’un couple qui tente de survivre longtemps après avoir atteint la date d’expiration. Pratiquement chaque scène peut être interprétée au deuxième degré. C’est intelligent, ça fonctionne. Le scénario est drôle et efficace mais je ne peux m’empêcher de penser qu’il manquait un petit quelque chose. Une touche de finition, un ficelage plus serré, un aiguisage des blagues, je ne sais pas trop. Le réalisateur Jeff Baena a avoué qu’il avait écrit Life After Beth il y a plusieurs années mais n’avait jamais trouvé les ressources ou l’intérêt de le porter au grand écran. C’est sa femme Aubrey Plaza (Julie Powers de Scott Pilgrim vs. The World et la Beth titulaire du film) qui l’a encouragé à, disons-le, ressusciter le scénario récemment. Une comédie légère avec très peur d’horreur, qui se retrouve dans la catégorie de Warm Bodies et autres; sympathique mais pas nécessairement mémorable.
Suburban Gothic est une comédie au ton quelque peu différent. Cliquez ci-dessous pour en savoir plus.
Raymond (Matthew Grey Gubler), presque 30 ans, est de retour dans la maison de ses parents bien malgré lui. Excentrique et intellectuel, il cadre mal dans la petite banlieue où son père (Ray Wise), entraîneur de football à l’école secondaire, et sa mère (Barbara Niven) mènent une vie rangée. Assailli de cauchemars, Ray décide de noyer ses malheurs au bar du coin où il rencontre Becca (Kat Dennings) à qui il confie avoir eu plusieurs expériences surnaturelles dans son enfance. Lorsqu’une équipe de travailleurs découvre un squelette enterré sur le terrain du domicile familial, Ray se verra à nouveau victime de violentes apparitions venant d’un autre monde. Contre les ordres de son père autoritaire, il enrôle Becca et prend les choses en mains.
Vous avez peut-être déjà vu Matthew Grey Gubler dans l’émission Criminal Minds, dans laquelle il interprète Spencer Reid. Sa présence à Montréal a assuré la vente complète des billets pour Life After Beth (dans lequel il tient un second rôle) et Suburban Gothic. Gubler est un naturel devant le public et grâce à lui, la session de questions suivant la représentation de Suburban Gothic fut une des plus divertissantes de l’histoire du festival. Il a fait une blague raconter par sa mère, présente dans la salle, a demandé à Ray Wise d’enduire le visage du réalisateur Richard Bates Jr. de savon gluant et a raconté des anecdotes amusantes. D’ailleurs, lui et Wise nous ont raconté, sous les lumières tamisés, des expériences surnaturelles franchement inquiétantes qu’ils ont vécu au cours de leurs vies.
Le film, quant à lui, aurait bénéficié d’un montage plus court d’au moins une vingtaine de minutes. Le scénario est très bien écrit et l’humour était parfaitement dans mes cordes mais on sent l’intrigue piétiner et tourner en rond à quelques reprises. À l’instar de Excision, le précédent long métrage du réalisateur, Suburban Gothic contient un caméo du légendaire John Waters et après avoir visionné les deux films, on comprend pourquoi. Bates est visiblement un fan et son esthétisme emprunte beaucoup aux meilleurs réalisations de Waters. Un hommage à tout ce que le créateur affectionne, Suburban Gothic est une comédie qui plaira à tous ceux qui ont grandi en étant le ou la « bizarre » de leur petite ville.
– Jessy Beaulieu