On peut toujours compter sur Fantasia pour nous offrir année après année des films de kung-fu dans la pure tradition chinoise. Une édition de Fantasia sans des longs-métrages d’arts martiaux, c’est comme si on mangeait des biscuits sans boire un bon verre de lait. On pourrait en profiter tout autant, mais c’est évident qu’il manquerait quelque chose.
Heureusement, les amateurs du genre ont eu leur dose lors de la diffusion de True Legend, un film racontant les périples d’un maître qui, à la suite de plusieurs tragédies qui sont survenues dans sa vie, a inventé un style de combat dont la pratique se fait sous l’influence massive d’alcool. True Legend est avant tout une histoire d’honneur, de famille et de résilience réalisée par Yuen Woo-Ping, un ancien chorégraphe de combats pour les films THE MATRIX et CROUCHING TIGER, HIDDEN DRAGON. C’est une oeuvre colorée, excentrique, parfois maladroite, mais hautement divertissante aux personnages sortis tout droit des légendes asiatiques et influencés par les héros et vilains des Comic Book américains.
Su Can (Man Cheuk Chiu) est un maître du Kung-fu au service de l’Empire de Chine. Après plusieurs années de services militaires, Su quitte l’armée afin de retrouver sa femme et fonder finalement une famille. Il laissera derrière son beau-frère et compagnon d’armes Yuan Ying (Xun Zhou), un homme au tempérament jaloux qui a toujours vécu dans l’ombre du célèbre général de guerre. Cinq ans après son retrait de l’armée, Su Can est sur le point d’ouvrir une école d’art martial, sa femme Yu et lui vivent heureux avec leur jeune garçon. Ce parfait bonheur prendra subitement fin lorsque Yuan, maintenant un puissant gouverneur, vient obtenir sa vengeance sur Su Can en prétextant récupérer la famille que celui-ci lui aurait « volée ». En fessant appel à des forces surnaturelles et une armure cousue à même sa peau, Yuan Ying vaincra Su. La jeune famille se retrouvera séparé et il en reviendra à Su Can de l’unifier à nouveau.
Tapissé d’action de la séquence d’ouverture à la dernière, True Legend ne nous offre pas beaucoup de temps de répit pour respirer. Une scène de combat et pratiquement suivie d’une autre, sauf pour quelques occasions où le film prend un moment pour instaurer un peu d’histoire. C’est dans ces séquences qu’on en apprend davantage sur les personnages, ce qui les motive, leurs rêves et surtout ce qui les unit les uns aux autres. Ces moments d’accalmie sont les bienvenues et ne sont jamais trop longs à nous en faire « taper du pied ». Juste assez d’informations sont transmises afin que l’on puisse se soucier de nos personnages principaux qui sinon progressent principalement dans un film bourré de combats. Ceux-ci sont par ailleurs extrêmement bien chorégraphie et nous tiennent en haleine. Le recours du ralenti et à des procédés d’images de synthèse aide à amener un caractère fantastique et surhumain à l’oeuvre. Chaque combattant possède son propre style de combat surdimensionné et c’est véritable plaisir de les voir s’affronter sur grand écran. Ce caractère d’excentricité et de grandeur est présent dans tous les aspects du film, des effets spéciaux à la performance des acteurs qui font par moment dans le grand-guignolesque.
La dimension tragique de l’oeuvre est l’élément principal qui propulse l’histoire. Su Can, autrefois un grand héros de guerre, tombe de plus en plus dans la dépression et l’alcoolisme, ce qui lui fera fleureter avec la folie. Chaque jour, il croira s’entrainer avec rien de moins que le Dieu du Kung-fu, il reviendra de ces journées épuisées et arborant des blessures sur la quasi-totalité de son corps. Des blessures qui, selon sa femme, il s’afflige à lui-même. Qu’ils soient les manifestations d’un esprit malade ou celles d’une véritable transcendance, ces segments d’entrainement sont primordiaux pour Su Can afin qu’il perfectionne sa maîtrise du combat corps à corps et rétablisse son estime de soi. On le verra repousser ses limites pour être une fois de plus bascule dans la défaite. Sa résilience s’effritera au fur et à mesure que son alcoolisme prendra le dessus. C’est également dans ces moments que les spectateurs se sentiront le plus liés à leur héros pour qui on finit par souhaiter qu’un moment de bonheur et de repos bien mérité.
Sans réinventé le genre, True Legend saisit les occasions de s’éloigner du combat pour instauré des éléments tragiques qui de concert avec le reste du film en font un récit aussi sombre, loufoque qu’amusant.
– Benoit Mercier