Le réalisateur Jim Mickle est surtout connu pour son travail dans le domaine de l’horreur. Mulberry St, Stake Land et We Are What We Are étaient tous de terrifiants films, pour de très différentes raisons. Avec Cold in July, il nous démontre à quel point quelques minutes de notre vie peuvent dramatiquement altérer le reste de nos jours.
Dans un Texas de la fin des années 1980, Richard Dane (Michael C. Hall) mène une existence tranquille, à la limite de l’ennuyant. Encadreur de profession, père d’un jeune garçon et mari dévoué, il détonne légèrement avec son environnement et son époque, où les hommes sont des cowboys et des machos. Lorsqu’un cambrioleur fait effraction chez lui, Rich s’arme nerveusement du fusil de son défunt père et abat le bandit, par réflexe involontaire. Complètement secoué par son geste, il n’est pourtant pas au bout de ses peines. Le voleur avait pour seule famille son père, un ex-détenu qui vient tout juste de sortir de prison et qui cherche maintenant à venger la mort de son fils unique. L’univers de Richard Dane est sur le point d’être complètement basculé.
Ce film, jusque dans son âme, est une lettre d’amour du réalisateur au cinéma des années 1980. La trame sonore est délicieuse, rappelant la musique de John Carpenter pour Halloween, les meilleurs morceaux de Giorgio Moroder ou, plus près de nous, ce que nous offre le groupe montréalais Le Matos. L’esthétique, l’histoire et même les personnages nous ramènent tous à une époque où les films d’action étaient plus simples, où les bons gars étaient des machos au grand coeur et conduisaient une Cadillac. La présence même de Don Johnson dans la distribution prouve les intentions de Mickle, qui réussit complètement à nous transporter dans le temps.
Là où le réalisateur perd pied, c’est au moment de traduire de façon cinématographique l’absurdité du matériel original. Cold in July est adapté d’un roman de l’auteur Joe R. Lansdale, qui a également écrit le livre qui a inspiré Bubba Ho-Tep, ce film mettant en vedette Bruce Campbell dans le rôle d’un Elvis vieillissant qui combat des morts-vivants aux côtés d’un JFK noir. Lansdale aime mélanger les tons et écrit avec beaucoup d’humour sur des sujets absolument sérieux. Il en résulte que Cold in July est un film constamment en quête d’identité, qui change de ton plus qu’une fois de manière assez radicale. À la limite, on dirait parfois regarder plusieurs courts épisodes mettant en vedette le personnage de Richard Dane ou un de ses acolytes, au lieu d’un film complet et cohérent. Cette inconsistance entraîne un sentiment de longueur au film, en plus de nous faire décrocher du récit de temps à autre.
Malgré tout, j’ai grandement apprécié l’aventure et je suis restée en haleine, souvent au bout de mon siège, jusqu’à la toute fin. Cold in July nous offre la perte d’innocence d’un homme douloureusement ordinaire à travers plusieurs détours, certains très drôles et d’autres absolument tragiques, aux couleurs de ce qui fut possiblement la meilleure décennie du cinéma.
– Jessy Beaulieu